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Diplomacy & Defense Think Tank News

Urban rail implementation in emerging economies: an opportunity for industrial development and technological learning?

The socio-economic well-being of urban areas depends on a well-functioning transportation system that makes it easier for people to access goods and services. Most urban areas in emerging economies are expanding in size and human population, resulting in increased demand for transportation and mobility. But these urban areas are characterised by high motorisation and inadequate public transportation resulting in traffic congestion, accidents and increasing greenhouse gas (GHG) emissions. Urban rail (metro, tram, suburban) can be the solution because trains can move a large number of people at high speed at short intervals, provide reliable services because of its spatial isolation, contribute minimal GHGs when the source of energy is renewable, and has a low accident rate. However, urban rail is expensive and require many technical and technological capabilities often unavailable in emerging economies because they are technological latecomers. This paper examines how two emerging economies, China and India, have been developing local capabilities through an industrial policy to ensure increased urban rail development.

Urban rail implementation in emerging economies: an opportunity for industrial development and technological learning?

The socio-economic well-being of urban areas depends on a well-functioning transportation system that makes it easier for people to access goods and services. Most urban areas in emerging economies are expanding in size and human population, resulting in increased demand for transportation and mobility. But these urban areas are characterised by high motorisation and inadequate public transportation resulting in traffic congestion, accidents and increasing greenhouse gas (GHG) emissions. Urban rail (metro, tram, suburban) can be the solution because trains can move a large number of people at high speed at short intervals, provide reliable services because of its spatial isolation, contribute minimal GHGs when the source of energy is renewable, and has a low accident rate. However, urban rail is expensive and require many technical and technological capabilities often unavailable in emerging economies because they are technological latecomers. This paper examines how two emerging economies, China and India, have been developing local capabilities through an industrial policy to ensure increased urban rail development.

Italie : tout change pour que rien ne change, encore (?)

IRIS - Fri, 01/07/2022 - 16:44

 

Pour la première fois sous la cinquième République, la France ne trouve pas de majorité à l’Assemblée nationale. Cette situation est bien plus commune chez nos voisins transalpins, qui connaissent ce format depuis 2018. La semaine dernière, les remous politiques en Italie ont fait penser à une nouvelle crise du gouvernement, mais l’expérience dans le domaine de la non-majorité semble éviter un énième blocage de l’État.

Énième crise politique interne, mais sans impact

L’annonce officielle a été faite mardi 21 juin : le ministre des Affaires étrangères italien, Luigi di Maio, quitte le Mouvement 5 étoiles, emportant avec lui plus d’une cinquantaine de députés pour un nouveau groupe parlementaire. Cette annonce – pressentie depuis plusieurs mois – a semé le doute quelques instants : le parti le plus représenté au parlement se scinde, qu’en sera-t-il de la coalition gouvernementale ? La frayeur fut de courte durée, car même si le MoVimento 5 Stelle implose, les deux partis devraient faire partie de l’alliance du gouvernement, pour des raisons différentes. D’un côté, le Mouvement 5 étoiles appuie déjà le gouvernement actuel, bien que leur leader Giuseppe Conte soit de plus en plus critique envers les politiques exercées par Mario Draghi. C’est d’ailleurs cette prise de distance qui a fait naître la faction dimaiaina (favorable à Luigi di Maio), proche du gouvernement et à vocation plus centriste. Pour résumer, le Mouvement 5 étoiles a changé et une frange conséquente devient un parti avec Luigi di Maio, tandis qu’une autre reste plus proche de l’idée originale du Mouvement, avec Giuseppe Conte.

Cette dissidence était à prévoir, car Luigi di Maio a considérablement changé lors des deux dernières années, passant de l’euroceptisme voué à la cause des gilets jaunes à un discours modéré pro-Europe. Son parti s’appellera Insieme per il futuro (Ensemble pour le futur), un nom qui rappelle bien entendu la coalition pour la majorité présidentielle d’Emmanuel Macron. Une position centriste qui annonce de potentielles alliances encore inimaginables il y a quelques mois, mais l’histoire politique italienne nous apprend que le paysage politique est en constante évolution : près d’un tiers des parlementaires ont changé de groupes durant les quatre dernières années. Luigi di Maio, grand artisan de ce phénomène, plaidait lui-même pour une amende de 150 000€ pour toute personne quittant le Mouvement 5 étoiles avant la fin de la législature.

Luigi di Maio quitte son Mouvement, mais reste au gouvernement. Il continuera de collaborer avec le Parti démocrate, qui ne serait pas contre l’idée de le recruter. Même le pire ennemi de Luigi di Maio, Vincenzo de Luca (Parti démocrate) s’est dit ouvert au dialogue. Récupérer l’actuel ministre des Affaires étrangères serait une manière de rendre encore plus fort le principal parti de centre gauche et d’enrayer la grande coalition centriste qui pourrait voir le jour.

Le gouvernement élargi de Mario Draghi donne des idées au centre

D’autres acteurs politiques commencent à se placer en vue des élections législatives de mai 2023, et une large alliance du centre est possible, bien qu’aux prémisses. Elle pourrait notamment comprendre Italia Viva de Matteo Renzi, Forza Italia de Silvio Berlusconi et – hypothétiquement – Matteo Salvini. Le leader de la Ligue est en perte de vitesse, doublé par la droite par Giorgia Meloni. Monsieur Salvini cherche donc une nouvelle place sur l’échiquier politique, et l’exemple de Luigi di Maio pourrait lui donner des idées. Matteo Salvini a largement réduit les attaques agressives, citant de plus en plus le Pape et se montrant plus spirituel que jamais. Une nouvelle orientation pour le capitano qui pourrait lui ouvrir les portes d’un centre droit encore existant, mais sans meneur. Seul Azione, de Carlo Calenda, ne semble pas intéressé par cette grande coalition, monsieur Calenda ayant toujours abhorré le Mouvement 5 étoiles, et donc Luigi di Maio. Un doute plane sur Forza Italia également. Les personnages forts du parti (Mara Carfagna et Renato Brunetta) sont plutôt favorables à cette union centriste, mais Silvio Berlusconi ne l’entend pas de cette oreille et compte revenir au premier plan cette année, malgré ses 85 ans.

Cette possibilité de grande coalition prend déjà forme à l’échelle locale. Des membres d’Italia Viva ont soutenu – officieusement – le nouveau maire de Palerme Roberto Lagalla (Union du centre) lors des dernières élections municipales. Ce même scrutin a vu entrer au conseil municipal la Nuova Democrazia Cristiana, une nouvelle version du parti politique centriste qui a régné sur l’Italie de l’après-guerre aux années 90.

La Nouvelle Démocratie chrétienne pourrait-elle être l’étendard de ce nouveau centre ? Difficile, car les créateurs de ce retour historique de la DC sont Marcello dell’Utri et Totò Cuffaro, tous deux condamnés pour association mafieuse, une bien mauvaise publicité pour un parti qui avait disparu suite à l’opération mains propres (contre la corruption) des années 90. Malgré cela, la Nouvelle DC est au conseil municipal de Palerme, avec plus de 5% des voix. L’idée semble difficile à réaliser, mais reste valable.

Un grand remue-ménage sur la scène politique italienne, dont la presse locale se régale, mais qui n’est donc que relatif : cette grande coalition du centre est estimée à 10-15% des intentions de vote. Une alliance qui ne peut pas gagner l’élection, mais qui pourrait être un levier pour une majorité lors des prochaines élections.

La sécurité Draghi, la multiplication des partis et des transferts

Il semble évident que Mario Draghi restera à son poste au moins jusqu’à la fin de la législature, et l’idée de le reconduire dans ses fonctions pour cinq années supplémentaires se fait déjà entendre. La confiance internationale retrouvée pour l’Italie après la turbulente période du gouvernement des extrêmes Lega-5 étoiles. Dans ce climat de stabilité retrouvée et dans le cadre de la préparation des élections de mai 2023, chaque candidat potentiel crée son courant politique, afin de pouvoir négocier une place dans la future coalition victorieuse ou dans l’opposition. Nous assistons à une multiplication des partis, souvent avec “Italia” dans le titre : Italia Viva, Italia al centro, Ancora Italia, Noi con l’Italia, Italia dei valori, Sogno Italia… L’omniprésence du nom du pays dans les intitulés indique aussi une certaine tendance à la prédominance de la nation, pour certain en opposition à l’Union européenne (comme Italexit per l’Italia de G. Paragone). Une quantité de partis qui adhéreraient quasi tous à la même coalition du centre, tout en étant rivaux. Selon l’historien Paolo Mieli, le grand centre italien prend un format similaire à celui de l’Union européenne : stable dans sa hiérarchie, mais où chaque petite entité peut bloquer l’engrenage pour différentes raisons qui sont propres à ses intérêts.

Malgré toutes ces difficultés, le système politique italien actuel fonctionne, tant qu’une personne accepte de prendre les rênes d’un centre fractionné de plus en plus difficile à contenter à chaque nouvelle création d’un groupe parlementaire dissident. La figure de Mario Draghi fonctionne parfaitement dans ce rôle, tant que celui-ci accepte d’y rester.

L’alternative grandissante à l’extrême droite : Giorgia Meloni

Une partie de la Lega plus au centre avec Matteo Salvini, une autre plus proche de son territoire avec Luca Zaia (le président de la région Vénétie), la Ligue ne miserait plus autant sur le souverainisme ou le populisme qui avait fait la notoriété de Matteo Salvini. La Ligue cherche sa nouvelle identité et perd du terrain – elle est aujourd’hui à environ 15% – et laisse le champ libre à Giorgia Meloni et Fratelli d’Italia, seule sur le pan de la droite dure. Madame Meloni a l’avantage de ne pas avoir (trop) d’alliances faites puis défaites, ce qui lui donne une image de personne qui garde la même ligne directrice. Son parti n’est pas sans reproches pour autant : alors que la légalité et d’ordre sont des mots sanctifiés chez les Frères d’Italie, Francesco Lombardo (leur candidat à l’élection de Palerme) était arrêté pour avoir acheté des voix à la mafia. Néanmoins, les forces acquises à la cause de Madame Meloni sont fidèles, et il y a fort à parier que Fratelli d’Italia sera le premier parti en Italie lors des prochaines élections, si nous ne prenons pas en compte les coalitions plus larges.

Dans ce jeu des alliances parfois inattendues, il semble bien difficile de trouver une majorité homogène pour la prochaine élection législative. La nomination du prochain président du conseil sera donc de nouveau un casse-tête qui rappelle celui de l’élection du président de la République et qui pourrait finir de la même façon, à savoir la reconduction dans ses fonctions du président sortant. Encore faut-il que Monsieur Draghi accepte, lui qui avait très ironiquement déclaré qu’il avait “une très belle équipe [de ministres]”. Mario Draghi pourrait donc rester à son poste, peut-être contre son gré, comme ce fut le cas pour le président de la République Sergio Mattarella, faute de mieux.

De grandes stratégies politiques avec des alliances parfois rocambolesques, pour revenir aux mêmes présidents. Il faut que tout change pour que rien ne change, comme disait l’écrivain Tommasi di Lampedusa.

« Équitablisme contre néolibéralisme prédateur » – 3 questions à Étienne Godin

IRIS - Fri, 01/07/2022 - 15:39

Étienne Godin, expert en politique internationale et coopération au développement, répond aux questions de Pascal Boniface à l’occasion de la parution de son ouvrage « Équitablisme contre néolibéralisme prédateur » aux éditions Edilivre.

Vous dénoncez un fossé abyssal entre les citoyens et leurs représentants qui ne méritent plus vraiment ce terme selon vous. Quelles en sont les causes ?

Oui, l’image est à peine exagérée. Tout comme est abyssal l’accroissement exponentiel des inégalités, que ce soit entre les régions du monde ou entre les gens. Les écarts se creusent à un rythme annuel de l’ordre de 10 à 15%. C’est énorme ! En gros, 95% de la richesse globale est concentrée entre les mains de 35% des Terriens (diversement répartis de par le monde). Et parmi ceux-ci, 1% en monopolise une bonne moitié. Alors que des milliards d’êtres humains crèvent littéralement de misère, les extra-riches, eux, vivent dans l’opulence et le gaspi. Environ 3.000 milliardaires, des dizaines de millions de multimillionnaires, tous leurs affidés…  Irrémédiablement, le pouvoir a glissé du monde de la politique vers celui de l’économie et de la finance. Les gouvernements (les parlements aussi, bien sûr) sont devenus de simples chambres d’entérinement de décisions prises dans les conseils d’administration des grosses banques et des multinationales. Il y a belle lurette qu’il n’est plus possible pour les mandataires politiques (à supposer qu’ils l’eussent un jour souhaité) de s’attaquer significativement aux intérêts de l’Oligarchie financière. « There is no alternative ! » martelait déjà Margareth Thatcher et, depuis une trentaine d’années, toutes les familles politiques traditionnelles, les anciennes et les plus récentes se sont converties sans grandes nuances à l’idéologie néolibérale. Croissance, compétitivité, libre-échangisme, contraintes budgétaires pour assurer le service de la dette (colossale et impayable sur plusieurs générations), sont les leitmotivs au nom desquels on détricote allégrement les services publics et la sécurité sociale. Dans ces Assemblées où prédomine un vaste centre mou, jamais aucun discours de rupture d’avec la pensée dominante n’est toléré. Dans les meilleurs des cas, il y est juste question d’instaurer l’une ou l’autre réformette cosmétique défensive. Aux deux bouts des hémicycles, s’agitent, sans grands effets, d’un côté une extrême droite haineuse qui crache son fiel nauséabond et de l’autre côté, une gauche radicale en panne d’imagination qui a souvent bien du mal à sortir des stéréotypes passéistes sclérosés. L’offre politique, donc, est peu diversifiée. Mais ce n’est pas tout ! La plupart des partis fonctionnent verticalement, comme des entreprises privées dont la finalité première est la distribution de mandats juteux. Prisonniers de leurs égos, de leurs ambitions personnelles, des avantages (gros salaires, collaborateurs, voitures, chauffeurs, restos, voyages, prestige…) liés à la fonction, la plupart des mandataires sont incapables de se remettre en question, ou de faire preuve de vision prospective. Alors, ils s’accrochent opiniâtrement au pouvoir. Les promesses électorales sont rarement tenues, çà et là éclatent des scandales de corruption. Difficile, donc, pour beaucoup de citoyens d’y trouver leur compte. Leur désorientation est d’autant plus grande que les dangers environnementaux et climatiques sont prégnants et que les crises, sécuritaires, sanitaires, énergétiques, les guerres, l’afflux de réfugiés se succèdent sans désemparer. Pas étonnant, dès lors, que la lassitude, le doute et l’inquiétude les saisissent. D’autant plus que leur pouvoir d’achat se détériore considérablement. La frustration et le mécontentement augmentent…

L’intelligence artificielle est-elle un danger ?

Une citation me vient à l’esprit : « Malheur aux peuples dont les robots sont devenus les maîtres ! » Et c’est vrai, le monde n’est pas à l’abri de certains esprits dérangés du type docteur Folamour, capables de fabriquer des armes infernales, des robots tueurs, ou encore des cyborgs transhumanistes à la Frankenstein. Ceci précisé, comment ne pas reconnaître les potentialités extrêmement bénéfiques de l’intelligence artificielle dans toute une série de domaines, comme par exemple l’imagerie médicale (qui m’a sauvé), l’astronomie, l’aéronautique… ? N’ayant personnellement aucune compétence scientifique, mon essai aborde la troisième révolution industrielle (intelligence artificielle, numérique, robotique, biochimie…) dans une optique sociétale, en tant que phénomène qui pèse lourdement sur nos modèles de vie. Tout ce qui permet à l’humanité de sortir quelque peu de l’obscurantisme est bon à prendre. Aucune réserve, donc, sur la recherche fondamentale, si ce n’est que ses résultats appartiennent au patrimoine commun de cette même humanité et que personne, aucun État, aucune entreprise privée ne devrait être en mesure de se les approprier. Quant à la recherche appliquée, elle devrait impérativement être balisée, réglementée, contrôlée, voire régentée par l’autorité publique. Dans mon essai, je propose une régulation selon le format UREED (Utile, Renouvelable, Ethique, Equitable, Démocratique). Bornons-nous ici à trois considérations. Tout d’abord, l’ADN du néolibéralisme est de produire et fourguer aux consommateurs tout et n’importe quoi. Or, vu que les nouvelles technologies sont fortement énergivores et voraces en minerais rares, une vision utilitariste s’impose : il faut opérer un tri rigoureux ! Ensuite, il convient absolument de réduire la fracture numérique (sociale, générationnelle, géopolitique). Enfin, dans l’intérêt de la démocratie et de nos libertés (pour éviter les scénarios de type orwellien), ce secteur devrait être placé sous la gouvernance mondiale.

Qu’appelez-vous le Multilatéralisme-Transcendantal ?

C’est une dimension essentielle de cet essai, car la vision équitabliste est avant tout humaniste, internationaliste, voire universaliste. Au plan mondial, le multilatéralisme n’a de sens que s’il forme un tout cohérent et que sa gouvernance s’exerce dans tous les domaines permettant le bien-être de l’ensemble des humains (près de 8 milliards) et la sauvegarde de la planète. Or, ce n’est pas comme cela que l’architecture institutionnelle mondiale fonctionne actuellement. Elle s’est construite autour de deux axes indépendants, deux systèmes clairement antinomiques. D’une part l’ONU qui, en tant qu’émanation démocratique des États souverains, prône la coexistence pacifique, la coopération et la solidarité. D’autre part l’OMC qui (avec le FMI et la Banque Mondiale) est régie de manière ploutocratique. Dans le droit fil de la doxa néolibérale, elle s’évertue à déréguler les marchés pour permettre le libre-échange, la protection des investissements et la compétition. C’est, en fait, la consécration de la loi de la jungle qui favorise la domination des puissants sur les faibles, l’exploitation des peuples, le pillage et le gaspillage des richesses naturelles. C’est absurde puisque, dans bien des cas, l’action de l’OMC rend dramatiquement inopérante celle de l’ONU (faim, réfugiés, environnement…). La première chose à faire serait donc de placer le commerce, l’économie et la finance sous la coupole d’une ONU transformée et revigorée (dans l’esprit de la Charte de San Francisco). Schématiquement, le Conseil de sécurité serait rééquilibré pour le rendre à la fois plus représentatif des réalités géopolitiques actuelles et plus opérationnel en empêchant les blocages excessifs. On créerait une nouvelle instance (sous le chapeau de l’Assemblée générale et du Conseil) pour le développement durable et le bien-être des peuples. Via diverses branches, elle s’occuperait  de la régulation économico-sociale (y compris le commerce et la finance), des grandes orientations en matière d’environnement et de climat, de la sécurité alimentaire, de la santé, de la révolution numérique (y compris l’espace) et de la mobilité. Elle disposerait des moyens nécessaires à cet effet dans tous les domaines : politique (un Directoire composé de personnalités indépendantes des États et du privé élues par l’AG de l’ONU au départ d’une liste établie par le Conseil de sécurité) ; administratif (efficace, mais pas pléthorique) ; scientifique (Centres spécifiques de recherches qui coopèrent avec les universités et autres centres publics et privés) ; financier (une Banque Centrale mondiale, un Fonds vert vraiment significatif, et, pourquoi pas une monnaie mondiale ; juridique (règlementations et tribunaux du type CPI). Utopique cette proposition ? Ce qui serait utopique, en tout cas, c’est de croire que l’on peut continuer comme actuellement sans risquer un effondrement majeur…

 

Le Sénégal au bord de la rupture politique ?

IRIS - Thu, 30/06/2022 - 17:40

Les Sénégalais sont attendus aux urnes le 31 juillet prochain pour les élections législatives. Ces élections se préparent dans un climat de très fortes tensions, rythmées par des manifestations organisées par l’opposition dont une partie a été écartée de la course. Dans quel contexte socio-économique va se tenir ce rendez-vous électoral, alors que la crise ukrainienne fait des émules au Sénégal comme sur tout le continent africain ? Pourquoi la situation est-elle très tendue dans le pays ? Le point avec Caroline Roussy, directrice de recherche à l’IRIS, en charge du programme Afrique/s.

Quel est le contexte économique et social du Sénégal à quelques semaines des élections législatives ?

Le contexte socio-économique est fortement dégradé. Sur le plan économique, le pays a été affecté par la crise du Covid-19 avec une diminution du fret maritime et subséquemment des échanges ce qui a, entre autres, entraîné une augmentation du prix des denrées alimentaires de base. À cela vient s’ajouter le conflit en Ukraine et l’impossibilité pour le marché sénégalais, comme d’autres marchés africains du reste, à s’approvisionner en blé et en oléagineux.

Outre la cherté de la vie, qui rend insupportable les inégalités et l’opulence de certains, les secteurs prioritaires sont dans un état délétère. Dans les universités, les étudiants accusent deux à trois semestres de retard … quand le système hospitalier se révèle complètement défait.  En mai dernier, onze nourrissons sont décédés dans un incendie survenu à l’unité néonatale d’un hôpital de Tivaouane. Comment supporter l’intolérable ? Cet épisode bouleversant n’est malheureusement que l’écume du quotidien des Sénégalais confrontés à la banalisation de la mort et de la violence.

Le contexte est inflammable et les manifestations cristallisent le ras-le-bol populaire.

Suite à des manifestations de l’opposition le 19 juin dernier, 3 personnes sont décédées. Comment expliquer ces tensions préélectorales ? Sont-elles une menace pour la démocratie au Sénégal ?

Les tensions préélectorales s’expliquent par le contexte socioéconomique, préalablement esquissé, mais aussi par l’invalidation d’une des listes de l’opposition – celle d’Ousmane Sonko troisième homme de la présidentielle de 2019 – pour les élections législatives du 31 juillet prochain par suite d’une décision du Conseil constitutionnel.

On observe depuis deux types de manifestations : organisation de marches et concerts de casseroles. Le 19 juin dernier, trois personnes ont perdu la vie ce qui a fortement résonné en écho avec les manifestations de mars 2021 au cours desquelles quatorze personnes sont décédées, décès pour lesquels les responsabilités tardent à être établies.

Après avoir laissé planer la possibilité d’une nouvelle manifestation, l’opposition entraînée par Ousmane Sonko – l’homme par lequel était arrivé les manifestations de mars 2021 où poursuivit dans une affaire de viol la justice s’était étonnamment révélée d’une rare célérité jetant la suspicion sur la gravité des faits reprochés – a décidé de jouer la carte de l’apaisement et d’aller aux élections législatives. Comment ce qui hier était impensable se révèle aujourd’hui possible, rappelons que trois personnes sont décédées ? Un statu quo a été trouvé dans le fait que la liste des titulaires a été invalidée, mais pas celle des suppléants. L’opposition battra désormais campagne pour faire élire la liste de ses suppléants. Quant au président de la République, Macky Sall, il entretient le doute sur la possibilité de briguer un troisième mandat en 2024… La confusion dans les différents camps peut difficilement créer les conditions de la concorde.

Le débat démocratique est polarisé par des postures quand les manifestants montrent une aspiration pour une respiration démocratique. Est-ce que cette demande sera réellement entendue au-delà du registre discursif ? La question reste posée. Macky Sall honorera-t-il son engagement à nommer un Premier ministre ? Les mois à venir seront à observer de près…

Dépendant de Moscou et de Kiev pour les céréales, les dirigeants africains continuent de défendre leur neutralité vis-à-vis du conflit russo-ukrainien. Comment se positionne l’Union africaine présidée par Macky Sall ? Quels en sont les enseignements ?

La question est intéressante, car si les dirigeants défendent une certaine neutralité vis-à-vis du conflit ukrainien, en réalité ils défendent leurs intérêts. Comme au Sénégal, un certain nombre de dirigeants ont peur de la rue qui dans les mois à venir pourrait se soulever. Dans cette équation, il faut considérer, sinon à faire le lit de la patrimonialisation de l’État quoique…, que les partenariats de nombreux pays se sont diversifiés d’où la volonté de préserver les intérêts économiques avec la Russie et l’« Occident ».

On a tendance à dire que les dirigeants africains ont voté contre la résolution mise au vote à l’Assemblée générale de l’ONU le 2 mars dernier dénonçant l’offensive russe en Ukraine. En réalité, seuls 17 États sur 54 se sont abstenus. Ce qui est loin d’être la majorité. L’abstention du Sénégal avait particulièrement retenu l’attention des Européens et des Français, eu égard à la proximité entre les deux pays. Plusieurs niveaux d’explication permettent d’éclairer ce vote tel que les deux propositions déjà énoncées auxquelles s’ajoute le fait que Macky Sall, sans doute entretenu du vote en ordre dispersé de ses homologues, et président en exercice de l’Union africaine a décidé de cette neutralité pour pouvoir exercer son mandat qui concerne avant tout l’avenir du continent africain.

Pour l’heure, on observe que Macky Sall s’est déplacé au nom de l’Union africaine en Russie début juin. Il a rencontré Valdimir Poutine à Sotchi qui l’a rassuré sur le fait de tout faire moyennant la collaboration de l’Ukraine pour que les marchés africains soient approvisionnés en blé et oléagineux. Le 21 juin, le président Zelensky s’est quant à lui exprimé devant quatre présidents africains. Il a joué la carte de la collusion en comparant ce conflit à « une guerre coloniale » sans remporter un franc succès au vu de la très faible audience réunie pour échanger avec lui… La neutralité serait-elle en train de basculer ? Les Occidentaux sont perçus comme responsables de la famine qui vient.

Si les Africains restent les parents pauvres des relations internationales, car rarement écoutés, il reste intéressant d’observer qu’une voix même timide se laisse entendre depuis le continent. Les Occidentaux auraient tort de ne pas l’écouter.

Expliquez-moi… Les GAFAM et les BATX

IRIS - Thu, 30/06/2022 - 16:25

La rivalité entre les États-Unis et la Chine est devenue globale : elle s’étend sur tous les domaines de la puissance et s’exprime l’ensemble du globe. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont imposé leur leadership d’un point de vue financier, économique, stratégique ou encore culturel, et, depuis la révolution numérique, dans le secteur technologique. Ce leadership s’est notamment traduit par le développement exponentiel de 5 géants du numérique américain : les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft). Leur succès financier et technologique sans pareil, qui s’est accéléré au cours de la dernière décennie, leur donne désormais les moyens d’étendre leurs champs d’actions à certains domaines préalablement réservés aux États. Leurs dirigeants/fondateurs forment désormais la grande majorité du club des hommes les plus riches de la planète. Mais la prospérité des GAFAM connait aujourd’hui plusieurs obstacles, dont un de taille, la concurrence chinoise. L’innovation chinoise dirigée par le PCC qui veut faire de la Chine une « cyber superpower », a façonné ses propres champions : les BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi). Autrefois copies parfaite des GAFAM, les BATX concurrencent désormais directement les leaders américains, en profitant notamment d’un important soutien du régime chinois. Depuis l’attaque frontale de Donald Trump envers les entreprises chinoises Huawei et TikTok, la guerre froide technologique entre la Chine et les États-Unis est devenue une réalité. Cette vidéo a été réalisée dans le cadre d’un partenariat entre l’IRIS et Hachette Éducation, autour de la version numérique du manuel « Histoire-Géographie, Géopolitique et Sciences politiques » destiné aux élèves de Première.

Rédaction et coordination éditoriale : Victor Pelpel
Montage : Joseph Medouni
Animations : Frédéric Petit (https://supralude.com/)

Zum fünften Mal: Israel vor wegweisender Wahl

SWP - Thu, 30/06/2022 - 15:15

Rund ein Jahr nach der historischen Bildung einer Acht-Parteien-Koalition hat sich das Parlament in Israel aufgelöst und Neuwahlen eingeleitet. Es sind die fünften Neuwahlen seit April 2019 – und ein Zeugnis der politischen Instabilität. Der Grund für diese sind zwei Blöcke, die sich konfrontativ gegenüberstehen: Einerseits das religiös-rechte und oftmals populistische Netanyahu-Lager und andererseits die heterogene Regierungskoalition, die das politische Spektrum von links bis rechts abdeckte und erstmalig sogar eine unabhängige arabische Partei einschloss.

Die Ablehnung Netanyahus als Koalitions-Kitt

Die Koalition des scheidenden Ministerpräsidenten Naftali Bennetts wurde zusammengehalten durch eine gemeinsame Ablehnung von Ex-Ministerpräsident Benjamin Netanyahu: Das hatte mit persönlichen Konflikten zu tun, aber auch mit Netanyahus Bestrebungen, eine parlamentarische Lösung für seine Korruptionsanklage zu finden. Diesem Ziel hatte er letztlich alles untergeordnet: Er schien unter allen Umständen eine reine Rechtsregierung etablieren zu wollen. Nur eine solche wäre willens gewesen, einen Ausweg für Netanyahu aus der Anklage zu ermöglichen, etwa durch ein Gesetz, das Ministerpräsidenten Immunität verleiht. Kombiniert hatte das Netanyahu mit populistischen Angriffen auf Medien und Justiz – insinuierend, dass in Israel nicht die Regierung, sondern ein »tiefer Staat« die Geschicke des Landes lenke. Nach drei Wahlen gelang es ihm am Ende nicht, die nötige Mehrheit zu organisieren. Damit hat er auch Teile des rechten politischen Lagers verprellt, das eine parlamentarische Mehrheit in der Knesset stellt.

Dies bereitete den Weg für die Bennett-Regierung, die die politisch heterogenste Regierung der Geschichte Israels war. Diese »Regierung des Wandels«, wie sie sich selbst nannte, hatte unter anderen zum Ziel, das politische System wieder zu stabilisieren: die demokratische Erosion und die Angriffe auf rechtsstaatliche Einrichtungen aufzuhalten sowie der gesellschaftliche Spaltung durch inklusive Kommunikation und Politik entgegenzuwirken. Das ist ihr teilweise gelungen, auch wenn sich die durch die Opposition geschürte gesellschaftliche Spannung nur moderat verringert hat.

Im Konflikt mit den Palästinensern war allerdings von vornherein klar, dass diese Koalition keine großen Fortschritte machen würde: Die rechten Parteien der Regierung, insbesondere Jamina und Neue Hoffnung, lehnen die Idee eines palästinensischen Staates kategorisch ab. Es blieb ein Spannungsfeld innerhalb der Regierung und führte zu einem politischen Nullsummenspiel.

Letztlich ist die Koalition jetzt an einem alle fünf Jahre zu verlängernden Gesetz gescheitert, das israelische Siedler unter israelisches Zivilrecht stellt und nicht wie die Palästinenser unter Militärrecht. Das haben einzelne Abgeordnete auf der Linken nicht mitgetragen, während es für die rechten Parteien eine unerlässliche Bedingung war. Gleichwohl steht auch das Ende dieser Regierung für eine veränderte politische Kultur, die über reine Machtpolitik hinausgeht: Mit Bennetts Rücktritt übernimmt laut Koalitionsvertrag automatisch Außenminister Yair Lapid übergangsweise das Amt. In einem ähnlichen Fall hatte Netanyahu dem Verteidigungsminister Benny Gantz 2021 die im Koalitionsvertrag vereinbarte Rotation noch verwehrt.

Fünfte Neuwahl: liberal-demokratische oder populistisch-majoritäre Demokratie?

Die nun im Herbst anstehende Wahl werden erneut richtungsweisend für die israelische Demokratie werden: Eines der zentralen Ziele der Opposition ist es, dem Parlament per Gesetzesänderung die Möglichkeit zu geben, Urteile des Obersten Gerichtshofs zu überstimmen. Ein anderes Gesetzesvorhaben zielt darauf ab, die Besetzung der Richter am Obersten Gerichtshof von politischen Mehrheiten im Parlament bestimmen zu lassen. Aufgrund der Mehrheitsverhältnisse im Parlament ließen sich so leichter Richter aus dem rechten Lager einsetzen. Zudem würde mit einer Rechtsregierung wohl auch das Thema der Teilannexionen des palästinensischen Westjordanlandes wieder auf die Tagesordnung kommen.

In den Umfragen hat der rechtsreligiöse Netanyahu-Block derzeit zwar keine Mehrheit, aber deutlich an Stimmen dazu gewonnen. Insbesondere der Likud, aber auch die religiös-rechtsextreme Partei »religiöse Zionisten« unter der Führung von Itamar Ben Gvir und Bezalel Smotrich sehen derzeit massive Zugewinne. Umgekehrt kämpfen vier der aktuellen Regierungsparteien mit der 3,25 Prozent Hürde um den Einzug in die Knesset. Schafft es eine der Parteien nicht, würden die Oppositionspartien nach derzeitigem Stand eine Mehrheit zusammenbekommen. Zum fünften Mal in dreieinhalb Jahren entscheiden die Israelis, in welche Richtung das Land steuern soll: in ein populistisch-majoritäres System oder an eine Demokratie, die sich zumindest innerhalb der Grenzen von 1967 an Grundlagen liberal-demokratischer Prinzipien orientieren will.

NRA, Cour suprême & Donald Trump : où en est la démocratie américaine ?

IRIS - Thu, 30/06/2022 - 14:49

Romuald Sciora, chercheur associé à l’IRIS, essayiste, spécialiste des États-Unis, répond à nos questions sur l’actualité américaine :

  • Pourquoi assiste-t-on aux États-Unis à une révolution conservatrice de plus en plus présente dans les institutions et une tolérance croissante pour les tactiques autoritaires au sein du Parti républicain ?
  • La Cour suprême américaine a consacré, jeudi 23 juin, le port d’armes hors du domicile en invalidant une loi de l’État de New York. Quels sont les enjeux de cette mesure ? Pourquoi le lobby de la NRA continue d’être si puissant ?
  • Dans ce contexte, où en est le parti républicain ? Qui est Ron Desantis, le favori des républicains pour la présidentielle américaine de 2024 ? Quid de Donald Trump ?

Unpacking Turkey’s Security Footprint in Africa

SWP - Thu, 30/06/2022 - 02:00

African states are aspiring to strengthen their defence capabilities against the back­drop of ongoing instability in the continent. Turkey has lately added security and defence cooperation to its existing soft power instruments and laid the foundations for long-term strategic cooperation with African countries. Increasing drone sales are an important part of this cooperation, but they are not its only component. A mutually reinforcing policy design of arms exports, military training, and defence diplomacy allows the Turkish administration to build long-term and institutional bonds with African countries. Today, Turkey is one among many security providers that African states can choose from. Also, the European Union (EU), in its February summit with the African Union, committed to strengthening its role in addressing shared peace and security challenges in the continent. To achieve this goal, the EU and its member states should revisit potential cooperation areas with partners that are active in the continent and consider the benefits of potential cooperation with Ankara.

L’OTAN : une alliance anti-chinoise ?

IRIS - Wed, 29/06/2022 - 18:49

Ce mardi 28 juin s’ouvrait le Sommet de l’OTAN à Madrid. L’OTAN est renforcé depuis le début de la guerre en Ukraine, l’organisation sous égide américaine apparaissant aux yeux des Européens comme la seule en capacité d’assurer la sécurité du Vieux continent. Malgré certains malentendus stratégiques ces dernières années entre européens et américains, ils sont plus que jamais soudés pour faire face à Vladimir Poutine. L’entrée de la Suède et de la Finlande, traditionnellement neutre diplomatiquement, concrétise la réviviscence de l’OTAN. Cependant, il semble que les Etats-Unis aient à long terme une autre ambition pour l’organisation. Si l’urgence est bien de faire barrage à la Russie sur le flanc est-européen, la priorité stratégique des États-Unis continue d’être la rivalité avec la Chine. Et l’OTAN constitue en cela un moyen pour les Etats-Unis d’emporter avec eux les Européens dans cette lutte et de constituer au-delà un axe des démocraties contre les régimes autoritaires. En témoigne l’invitation du Japon, de la Corée du Sud et de la Nouvelle Zélande au sommet, des alliés de premier plan pour Washington dans l’Indo-Pacifique. Même si les Européens ont des divergences nettes avec la Chine, qu’ils ont à plusieurs reprises exprimées, celles-ci ne datent pas de la crise ukrainienne. En ce sens, accepter que l’OTAN devienne une organisation antichinoise et ainsi s’aligner sur l’agenda stratégique américain à l’égard de Pékin constituerait une double erreur.

L’analyse de Pascal Boniface

Les espaces maritimes, nouveaux territoires de la sécurité internationale

IRIS - Wed, 29/06/2022 - 18:42

Les tensions sur l’accès aux ressources des mers et des océans comme le durcissement touchant les revendications sur les frontières maritimes montrent combien les espaces marins sont devenus importants dans les calculs des États et dans la dynamique des relations internationales contemporaines.

Avec un accent mis sur la connectivité maritime et sur la liberté de navigation, le concept d’Indo-Pacifique est l’illustration la plus récente de l’importance des espaces maritimes au sein des relations internationales. Si, pour certains États, les rivalités de puissances se sont déplacées en mer, pour d’autres, l’horizon au-delà des côtes est devenu une source de croissance et de richesse qu’il faut pouvoir protéger. En effet, au moment où nombre de pays découvrent la valeur de leur « économie bleue », ils en réalisent les fragilités, qu’il s’agisse de l’amenuisement des stocks halieutiques ou de l’impact des dérèglements climatiques sur la santé des océans. Quel que soit l’objectif recherché, la sécurisation des espaces océaniques et une meilleure gouvernance maritime sont à l’ordre du jour.

La « navalisation » des mers, c’est-à-dire l’accent mis par beaucoup d’États sur le développement de marines modernes, est l’expression la plus visible de ces prises de conscience. Dans un contexte de concurrence accrue pour l’accès aux ressources et le contrôle des principales voies de communications maritimes, la Chine a rapidement développé ses capacités navales grâce à un effort de construction sans précédent.

Mais, au-delà des questions de prestige et d’acquisitions de projection de puissance qui sont le propre des marines de guerre, on assiste à la création et à l’essor de flottes de garde-côtes chargées de la police maritime et de la lutte contre la criminalité en mer. En effet, les ressources qui se trouvent sous la surface de l’océan sont de plus en plus menacées de surexploitation. La pêche illégale dévaste les stocks mondiaux déjà réduits et pourrait bientôt constituer une source non négligeable de crise. En mer de Chine méridionale, la concurrence pour les droits de pêche ainsi que pour les réserves de pétrole et de gaz offshore constitue l’un des principaux facteurs de tensions et de conflits.

Le domaine maritime met en évidence les tensions entre la souveraineté nationale et les défis transnationaux, entre les régions littorales de l’océan en tant que zones économiques exclusives et la haute mer en tant que bien commun mondial. Il s’y greffe désormais la question des grands fonds et de leur exploitation.

Au final, on observera que le domaine maritime, si longtemps sous-estimé dans la couverture des affaires internationales, occupe pourtant une place décisive dans la diplomatie bilatérale, régionale et multilatérale. Au moins quatre problématiques majeures liées à l’insécurité maritime se détachent dans la hiérarchie des préoccupations des principaux acteurs et usagers de la mer : la territorialisation des espaces maritimes, la navalisation et les dynamiques globales de réarmement naval, tout comme la persistance de la piraterie et du brigandage maritime en parallèle au développement d’une criminalité bleue transnationale où l’impact du changement climatique sur les océans tient une place grandissante.

La territorialisation des mers

Aussi variées que communes, les tensions portant sur l’accès et l’usage du milieu maritime ont pris une importance croissante dans les stratégies nationales des États. Elles sont à l’origine du développement des principaux outils et acteurs tant civils que militaires de la sécurité en mer. Nationalisme bleu et crispations sur l’exploitation des ressources maritimes — poissons, minéraux, énergies — ont le potentiel de multiplier les zones de tensions, à la faveur de revendications abusives et d’expansions territoriales non fondées en droit.

La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM), qui fête ses 40 années d’existence en 2022, a pourtant instauré des règles permettant de délimiter les espaces maritimes ainsi que les droits et obligations des États côtiers. Il faut admettre que celles-ci sont complexes et certains États comme le Brésil, l’Inde ou la Chine en ont adopté des interprétations diverses.

La CNUDM distingue trois types de territoires en mer : les eaux territoriales, qui s’étendent sur 12 milles marins à partir de la côte, et qui s’accompagnent d’un droit de « passage inoffensif » pour les navires de pavillons étrangers ; une zone de police contiguë, qui s’étend sur 12 milles supplémentaires ; une zone économique exclusive (ZEE), qui s’étend jusqu’à 200 milles marins (soit 370 km) du littoral. La délimitation de ces frontières liquides figure au premier plan des questions qui alimentent les différends.

Cette tendance à l’appropriation fait que le principe de la liberté des mers, prônée par le juriste hollandais Grotius au XVIIe siècle, apparait de plus en plus contestée. La CNUDM s’est pourtant efforcée de trouver un compromis entre ce principe et les États côtiers soucieux d’affirmer leur souveraineté sur leurs espaces maritimes. Ainsi, si la liberté de navigation en haute mer a pu être préservée, la mise en place de délimitations maritimes a favorisé des litiges entre États désireux d’accroitre leur potentiel économique et stratégique et favorisé un phénomène de territorialisation des mers.

Autres espaces maritimes très convoités, les grands fonds représentent un enjeu géopolitique de taille. La France s’est dotée d’une stratégie de grands fonds en février 2022 (1) comme l’ont fait avant elle la Chine, les États-Unis ou le Royaume Uni. Ce document souligne qu’il n’est pas seulement important de pouvoir intervenir à de très grandes profondeurs, mais également de pouvoir surveiller ce qui s’y passe, en particulier autour des câbles sous-marins et des ressources minérales. Comme l’espace et le cyberespace, les profondeurs représentent un champ de conflictualité potentielle. De par les ressources naturelles qu’elles recèlent — dont les métaux rares —, elles suscitent de plus en plus de convoitises.

Navalisation et rivalités de puissance en mer

Les pays du monde entier améliorent leurs marines et intensifient leurs activités en mer. Cela inclut la Chine, qui a réalisé en très peu d’années des avancées qualitatives et quantitatives de son outil naval, mais aussi l’Inde, le Japon, la Corée du Sud ou la Turquie. La tendance est à la production d’unités polyvalentes intégrant les nouvelles technologies critiques (drones, robotique, intelligence artificielle) appelées à être mises en œuvre dans les conflits du futur.

La Chine appartient désormais au groupe restreint des marines disposant de porte-avions — un troisième sera bientôt mis à l’eau — et de sous-marins nucléaires. Les réalisations chinoises et la mise en œuvre de stratégies anti-accès cherchent notamment à affaiblir la dissuasion militaire des États-Unis dans la région, ce qui a conduit certains États à s’interroger sur la capacité d’intervention de Washington en cas de conflit de haute intensité impliquant la Chine. Le scénario d’une crise dans le détroit de Taïwan est dans de nombreux esprits depuis l’agression russe de l’Ukraine. Ces rivalités incluent des efforts pour obtenir l’accès à des ports et à des facilités de stationnement, car si pour l’heure la Chine ne possède qu’une seule base navale à l’étranger avec Djibouti, elle s’efforce, comme la Russie ou l’Inde, d’étendre sa présence dans l’Indo-Pacifique. Fait nouveau, elle propose des partenariats économico-sécuritaires aux États du Pacifique Sud, dont certains sont peu disposés à amorcer une coopération policière ou dans le domaine de la sécurité maritime avec Pékin.

Cette recherche du statut de puissance navale va au-delà d’ambitions étatiques et touche l’Europe, elle-même soucieuse de s’affirmer comme un acteur global de la sécurité maritime. Elle a d’ailleurs réussi à se construire une légitimité dans ce domaine. Elle peut s’appuyer sur sa stratégie de sûreté maritime (SSMUE) adoptée en 2014 et sur le plan d’actions, révisé en 2018, qui en découle. L’Union européenne s’est également dotée de stratégies régionales, dont celle sur le golfe de Guinée, puis en 2021 sur l’Indopacifique, suivant en cela l’exemple d’États membres comme la France, l’Allemagne et les Pays Bas. L’Union européenne s’est déjà montrée capable de mobiliser efficacement des moyens d’actions, face aux trafics en tous genres par voie maritime (migrants, armes, stupéfiants). Elle reste d’ailleurs engagée face à la piraterie et à l’insécurité maritime dans l’Ouest de l’océan Indien, où l’opération « Atalante » déployée depuis 2008 lui permet d’élargir ses partenariats grâce à une diplomatie navale très active.

La persistance du phénomène de piraterie et de brigandage maritime

Les dernières statistiques publiées par le MICA Center (2), organisme dépendant de la Marine nationale et basé à Brest, montrent que la piraterie reste un enjeu maritime récurrent. Les États s’efforcent de développer des coopérations et de collaborer pour s’attaquer à ce problème, mais il se révèle difficile à éradiquer dans la mesure où les solutions de long terme se trouvent à terre. Bien que la piraterie ait globalement diminué dans le monde, avec un total de 317 actes de piraterie et de brigandage maritime en 2021, le phénomène reste préoccupant en Indo-Pacifique, notamment dans le détroit de Singapour, qui totalise 57 incidents, auxquels s’ajoutent les 14 survenus dans les eaux philippines.

La piraterie au large de l’Afrique de l’Ouest a attiré l’attention internationale au début des années 2010, alors que l’activité des pirates au large de la Somalie et de la Corne de l’Afrique commençait à faiblir. Lorsque la crise en Afrique de l’Est a décru — grâce à une combinaison de patrouilles navales internationales, de personnel de sécurité privé et de réformes des systèmes judiciaires régionaux —, le phénomène a paru se déporter dans le golfe de Guinée où, après le siphonnage du pétrole, des prises d’otage contre rançon se sont développées. Une grande partie de l’activité en Afrique de l’Ouest est en fait classée dans la catégorie des vols à main armée en mer, plutôt que dans celle de la piraterie, car elle se déroule essentiellement dans les eaux territoriales des États, alors que la piraterie se déroule par définition dans les eaux internationales.

Dans le golfe de Guinée comme dans d’autres régions du monde, on trouve la crainte que des organisations terroristes régionales imitent les pirates du delta du Niger et adoptent leurs tactiques, en particulier Boko Haram. En Asie du Sud-Est, des groupes extrémistes se sont tournés vers la piraterie, comme Abu Sayyaf, un groupe philippin lié à l’État islamique, qui a attaqué des navires dans les mers de Sulu et des Célèbes et pris des membres d’équipage ou des passagers contre rançon.

Dans ce schéma, criminalité et pauvreté s’auto-alimentent et les communautés côtières en subissent les conséquences. La piraterie et les vols à main armée privent les régions côtières d’opportunités de développement socio-économique et d’infrastructures. Elles entravent les économies régionales en perturbant des industries essentielles comme la pêche et le tourisme, tout en augmentant le coût de la vie. Ces coûts économiques, associés à des possibilités d’emploi déjà limitées, créent un cycle de criminalité qui est à la fois une cause et un sous-produit de la piraterie et des vols à main armée.

L’essor de la pêche illégale et de la criminalité bleue

La criminalité bleue (3) recouvre diverses activités illicites tant la mer est un moyen de transport qui se généralise, avec comme corollaire l’accroissement de nombreux trafics : drogues, êtres humains, armes, contrefaçons, espèces marines protégées.

La pêche illicite, non déclarée et non règlementée, constitue un fléau. Elle affaiblit les stocks halieutiques et les écosystèmes marins et son impact économique reste préoccupant. Elle prive les communautés de pêcheurs de revenus, d’emplois et peut menacer la sécurité alimentaire de toute une population. Le phénomène représente près de 20 % des captures annuelles mondiales. Un poisson sur cinq pêché dans le monde est capturé illégalement (4), ce qui mine les efforts pour s’attaquer officiellement aux problèmes de surpêche. Pourtant, les stocks mondiaux de poissons ayant diminué de près de 50 %, la pression est de plus en plus forte pour s’attaquer à la surpêche et aux gouvernements qui l’encouragent.

La pêche illégale découle généralement d’une gouvernance locale faible, mais aussi d’une carence en moyens de surveillance et de contrôle des espaces maritimes. L’insécurité face à des flottilles de pêches clandestines accentue ces dysfonctionnements qui, de façon globale, requièrent la mise en place d’équipements permettant une meilleure connaissance du domaine maritime, des moyens d’échanges d’informations mais aussi la formation de personnels spécifiques au sein d’agences maritimes spécialisées.

La flotte chinoise de pêche en eaux lointaines est de loin la plus importante au monde et opère dans toutes les régions du globe. En plus de répondre à une demande alimentaire, ces navires sont utilisés à l’étranger à des fins stratégiques. La Chine s’est toutefois efforcée d’améliorer son image de puissance maritime responsable. Pékin a instauré certains changements, notamment des réglementations plus strictes sur l’utilisation de pavillons de complaisance par les navires chinois. Mais la Chine continue de subventionner les opérations de la flotte de pêche en eaux lointaines, ce qui représente une menace importante pour la durabilité des ressources océaniques.

 

Publié sur Areion24news.

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Notes

(1https://​www​.defense​.gouv​.fr/​a​c​t​u​a​l​i​t​e​s​/​a​r​m​e​e​s​-​s​e​-​d​o​t​e​n​t​-​d​u​n​e​-​s​t​r​a​t​e​g​i​e​-​m​i​n​i​s​t​e​r​i​e​l​l​e​-​m​a​i​t​r​i​s​e​-​f​o​n​d​s​-​m​a​r​ins

(2) Maritime Information Cooperation and Awareness Center, « Bilan annuel 2021 : Sureté des espaces maritimes » (https://​www​.mica​-center​.org/​p​u​b​l​i​c​a​t​i​o​ns/).

(3) C. Bueger, T. Edmunds, « Blue Crime : Conceptualising transnational organised crime at sea », Marine Policy 119 , 2020 (http://​bueger​.info/​w​p​-​c​o​n​t​e​n​t​/​u​p​l​o​a​d​s​/​2​0​2​0​/​0​8​/​B​u​e​g​e​r​-​a​n​d​-​E​d​m​u​n​d​s​-​2​0​2​0​-​B​l​u​e​-​C​r​i​m​e​.​pdf).

(4) Global Fishing Watch (https://​globalfishingwatch​.org/​c​o​m​m​e​r​c​i​a​l​-​f​i​s​h​i​ng/).

 

 

The Situation in Libya: Reflections on Challenges and Ways Forward

European Peace Institute / News - Wed, 29/06/2022 - 17:46

The UN Security Council is expected to renew the mandate of the UN Support Mission in Libya (UNSMIL) by the end of July 2022. Deliberations on UNSMIL’s mandate are unfolding amid a protracted political impasse. Since March, renewed competition between the two rival executives has paralyzed the UN-endorsed framework that emerged from the Libyan Political Dialogue Forum. This competition among elites has also drawn attention away from the underlying drivers of violence and insecurity and caused the political, security, economic, and human rights situations to deteriorate.

In this context, the International Peace Institute (IPI), the Stimson Center, and Security Council Report co-hosted a virtual roundtable discussion on June 9, 2022. This roundtable offered a platform for member states, UN stakeholders, civil society representatives, and independent experts to share their assessments of the situation in Libya in a frank and collaborative environment. The discussion was intended to help the Security Council make more informed decisions with respect to the prioritization and sequencing of UNSMIL’s mandate and the mission’s strategic orientation and actions on the ground.

Participants agreed that the UN continues to be an important partner to Libya and that UNSMIL’s mandate is broad and flexible enough to enable continued engagement. Nonetheless, it will be essential for the UN Security Council and UNSMIL to recalibrate international support to the country in the coming months. To this end, participants urged the UN to leverage its role as an impartial actor that can increase cohesion among the various dialogue initiatives, hold stakeholders accountable, and sustain engagement with civil society groups. Participants also identified the need for the UN to develop and implement a more holistic approach to its mandate by focusing more on economic issues and mainstreaming human rights across all processes. Further, participants noted that UNSMIL needs to effectively communicate its strategy and priorities, including its desired “end state.” Finally, participants urged both the Security Council to remain unified and continue prioritizing Libya and member states to ensure that their actions are consistent with their stated positions.

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